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BAAL

sur le pont et pénétrer comme un couteau dans la capitale turonienne. À travers la portière, ce n’était que visages terrifiés. Tout le monde, immobile, regardait passer avec émotion ce monstre allongé, bas et vertigineux.

Sur un rail de tramway, nous dérapâmes. L’auto vint presque jusqu’à la terrasse d’un café où j’eus le temps de voir une panique commencer. Déjà nous étions loin. Impassible, notre chauffeur continuait son train fou.

Et quand, sortis de la ville, nous eûmes à affronter d’innombrables routes en lacets, des côtes à dix pour cent et des virages à double révolution, il ne ralentit point encore. Je n’ai rien vu depuis lors de plus fantastique que notre descente sur une immense pente, raide comme la rue de la Montagne-Sainte-Geneviève, avec, en bas, au centre de la courbe, un village aux mille lumières. J’avais l’impression d’une chute, d’une cabriole dans un précipice effrayant. Nos phares éclairaient, en face, une forêt située à trois ou quatre kilomètres, où l’on eut distingué les essences tant le jet lumineux était puissant. En bas, sans souffler, nous repartîmes sur une côte verticale. Le chauffeur modifiait la prise d’engrenages des vitesses, et nous paraissions ne point ralentir.