Page:Dunan - Eros et Psyché, 1928.djvu/19

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malgré les historiens qui donnent toujours du prestige au passé, malgré les littérateurs et la poésie, l’humanité n’est qu’un troupeau de pauvres êtres semblables. Mais ils sont semblables nus. Habillés, ils se distinguent. Alors il y a des reines et des servantes, des puissants et des mendiants… Il se questionna alors : les passions sont-elles néanmoins partout les mêmes ? Cette fois, l’esprit de Jean Dué buta. Comment, en effet, savoir s’il est des passions vraiment caractéristiques de la toute-puissance ? Il pensa un instant à des parents pauvres qu’il avait et dont les fils, au lieu d’étudier, travaillaient dès leurs treize ans dans les ateliers. Devait-il croire qu’il n’y eût aucune différence entre les plaisirs que lui-même devait attendre de la vie et ceux qu’y chercheraient ces étrangers de son sang ?

Cela lui coûta à admettre. Mais s’il s’accordait pourtant une aristocratie passionnelle — virtuelle, car il était vierge et ingénu — il devrait allouer à Marie-Thérèse dans sa puissance d’avoir réalisé sans doute un au-delà, une perfection de jouissances que lui-même, petit bourgeois, ignorerait.

Il ne se formula pas exactement les types de passions et de plaisirs auxquels se référait son raisonnement, parce qu’une force, en lui, refusait d’amener cette donnée à la conscience