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Page:Dunan - Eros et Psyché, 1928.djvu/244

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arrache d’abord un cri de douleur et ensuite caresse délicatement la chair meurtrie, Jean retrouve exact et parfait le frisson qui la veille, ou plutôt le matin même, lui a révélé l’amour.

Ses jambes fléchissent, il lui faut s’accoter, avec un frisson crispant ses doigts clos.

Une idée lui vient aussitôt :

« Elle pense à moi. L’amour se transmet comme la foudre. Son désir est si ardent qu’il me possède de loin comme un corps. » Jean gravit ainsi jusqu’aux cimes du mysticisme qui ne connaît presque plus rien aux choses de la terre. Il va maintenant, d’un pas instinctif. Quelque secret mécanisme, sorti de la conscience claire, lui fait seul choisir les chemins qu’il faut.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

C’est la campagne maintenant. La lune n’est pas encore levée, mais elle colore déjà un large pan de l’horizon. Le ciel est couvert de nuages lourds. Au loin, des bruits de voiture font grincer la chaussée fraîchement empierrée. Le métal des roues pousse une plainte fine et les essieux donnent comme un sanglot.

Jean Dué !…

On dirait qu’une voix vient de prononcer ce nom, hautement. Le jeune homme, l’échine glaciale, s’arrête.

La nuit est muette. Les bruits s’éloignent.