Page:Duplessis - Les Peaux-rouges, 1864.djvu/124

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gris, le seul animal que l’on n’ait jamais pu dompter, et son triomphe dura peu. L’ours revenu bientôt de sa surprise, se leva sur ses jambes de derrière et se précipita sur Antoine, qui, toujours immobile comme un roc, l’attendait son large et fort coutelas de chasse à la main. Antoine, lorsque l’ours ne fut plus qu’à un pas, au lieu de songer à prendre la fuite, se jeta d’un bond sur le monstre, lui enfonça son coutelas tout entier dans le ventre ; puis se serrant le plus possible contre lui, afin que l’ours ne pût ni le mordre ni le déchirer avec ses griffes, il essaya de le faire tomber par terre. Quoique le sang qu’il perdait en abondance l’affaiblit beaucoup, l’ours était cependant d’une force tellement merveilleuse, que bientôt Antoine, serré dans ses bras de fer, commença à étouffer. Le sang lui monta au visage, un brouillard s’étendit sur sa vue, et il lui parut que ses os craquaient sous la formidable étreinte du monstre. Pendant quelques secondes Antoine lutta encore pour l’acquit de sa conscience ; mais sen-