Page:Dupuis - Abrégé de l’origine de tous les cultes, 1847.djvu/404

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ligion au peuple. Cet aveu est déjà beaucoup pour nous, puisqu’on reconnaît que la religion, dans son origine, ou au moins dans l’usage que l’on a cru en devoir faire, doit être rangée au nombre des autres institutions politiques. Il nous reste actuellement à examiner si l’on a eu droit de recourir à l’illusion pour établir l’empire de la justice et de la vérité ; si on a beaucoup gagné à le faire, et quels ont été les moyens employés pour y arriver, et il ne nous sera pas difficile de prouver que la religion n’est pas plus utile aux mœurs et à la législation, qu’elle ne donne la pluie et le beau temps : donc il n’en faut pas.

J’ai déjà dit et cru, quoique mon assertion puisse être regardée ici comme un paradoxe par ceux qui pensent que la morale de l’homme d’État ne peut pas toujours être celle du philosophe ; j’ai cru et je crois encore que nul mortel n’a droit de tromper à son semblable, quelque intérêt qu’il puisse s’en promettre, encore moins d’établir un système général d’imposture pour toutes les générations. Ainsi, Numa n’est à mes yeux qu’un méprisable jongleur, quand il feint d’avoir des entretiens secrets avec la nymphe Égérie, et quand, pour façonner les Romains à la servitude, il établit des pontifes, des augures et tous ces divers sacerdoces qui ont tenu le peuple de Rome dans la dépendance des grands, qui pendant longtemps pouvaient seuls être admis à ces fonctions. J’en dis autant du législateur des Juifs, qui avait des entretiens avec l’Éternel. Son peuple est devenu la