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Page:Duquet - Pierre et Amélie, 1866.djvu/12

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PIERRE ET AMÉLIE.

autre ressource que les ustensiles strictement nécessaires au défrichement d’une terre ; mais son courage, joint à une persévérance invincible, suppléa à tout, et ses efforts furent bientôt couronnés de succès.

Les arbres réduits en une cendre féconde ne redirent plus les échos de la cognée triomphante ; le soc tranchant de la charrue déchira les entrailles productives de la terre, et une moisson abondante vint sourire au laborieux Léopold, largement récompensé de ses incessants labeurs. Voyant l’état progressif de son petit domaine, il voulut se bâtir une habitation forte et durable, sur un endroit d’où il pût embrasser d’un seul coup d’œil toute l’étendue de son vallon ; il choisit en conséquence la place où nous sommes assis, et éleva cette cabane que j’habite depuis bien des années. Une épouse, qui lui ressemblait en vertu, vint partager son bonheur ; mais, depuis cette union que le ciel semblait bénir, un an s’était à peine écoulé qu’elle mourut quelques jours après avoir donné la lumière à un fils, qu’elle nomma Pierre, en mémoire du grand saint qui lui avait été souvent propice dans ses fréquentes invocations.

Léopold restait seul avec son fils, qui tout en le consolant de la perte de sa compagne, ne lui en faisait pas moins verser de larmes ; « pauvre petit, disait-il souvent, si jeune être privé des douceurs d’une mère ! » Mais la Providence qui veillait sur le jeune Pierre, lui envoya une seconde mère. Léopold avait une sœur nommée Clothilde, dont le mari venait de perdre la vie dans une expédition contre les sauvages ; cette jeune et brave