femme supportait le poids de son malheur avec la résignation d’une bonne chrétienne ; mère depuis deux lunes, elle ne vivait que pour sa petite fille, Amélie, dont le seul sourire suspendait toutes ses peines. Léopold et Clothilde connaissait l’analogie de leur caractère ; depuis leur enfance ils n’avaient cessé de se témoigner le plus vif amour et la plus grande sympathie ; ils étaient frappés d’un même sort, ils voulurent partager ensemble leur malheur et élever leurs enfants sous un même toit.
Le jeune Pierre trouvait déjà une seconde mère dans Clothilde ; et Léopold pouvait désormais s’éloigner de son habitation, et s’occuper des divers travaux de sa ferme. Au printemps, la neige fondue se précipitant par torrents de tous les points de cette colline, tenait trop longtemps le domaine inaccessible à la herse ; pour obvier à ces inconvénients, Léopold creusa de nombreuses rigoles de larges et profonds fossés, qui portèrent bientôt toutes les eaux superflues dans le ruisseau que vous voyez fuir au milieu du val ; son lit profond recèle toujours une eau abondante et pure pendant les plus grandes chaleurs de l’été, et désaltère les troupeaux. Cet homme laborieux ne pouvait souffrir le moindre désordre dans l’arrangement de sa ferme ; ici le terrain était propre à voir mûrir le mil ; là, le blé devait onduler à flots pressés ; sur la pente de ce coteau sablonneux, la patate étalerait la verdure de son feuillage, et le maïs roulerait en nappes d’or ; aussi, était-il immensément récompensé de ses soins minutieux.
Pour Clothilde, elle s’occupait des travaux qui étaient de son ressort, une propreté continuelle régnait dans