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Page:Duquet - Pierre et Amélie, 1866.djvu/23

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PIERRE ET AMÉLIE.

IV


Cependant les granges regorgeaient de l’or des moissons, les troupeaux erraient à l’aventure, de la colline au chaume, du chaume à la forêt ; la grive gourmande, l’agaçante hirondelle et l’étourneau criard migraient sur d’autres plages ; les campagnes dépouillées et jaunies frissonnaient sous le souffle glacé du nord. Une fumée noire et épaisse serpentait sur le toit des chaumes ; à un jour nuageux succédait parfois une nuit calme et brillante ; et de fréquentes brumes matinales enveloppant les montagnes et les vallées dérobaient aux regards les rayons d’un soleil éloigné : c’était l’automne.

Le temps était venu où Léopold et Clothilde avaient l’habitude de convier à une grande fête tous leurs amis ; on choisissait, pour rendre la fête plus agréable, une des plus belles soirées de septembre. À peine le jour avait-il fait place à la nuit indiquée, qu’assemblés dans une des plus larges avenues du bocage, on consumait les gâteaux, les coupes se vidaient au milieu des chants, des ris, de mille anecdotes naïves, mille réparties joyeuses, et la danse commençait avec le plus joyeux entrain. Un des invités, reconnu pour bon musicien, faisait résonner les cordes harmonieuses d’un violon sous les coups précipités de l’archet, pendant que ses pieds frappaient en cadence le sol durci. Pierre, unissant au son du violon les accords de sa flûte, complétait le brillant orchestre.