Page:Duquet - Pierre et Amélie, 1866.djvu/34

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
35
PIERRE ET AMÉLIE.

jour. Quelle surprise !… je m’aperçois que mes habits ne sont que des lambeaux ; mes brebis accourent de la colline m’offrir leurs toisons ; le rouet ronfle, ensuite vient le métier ; et me voilà avec de nouveaux habits. Mais pour vivre heureux, il faut vivre avec Dieu ; alors je me garde bien de l’offenser ; je le prie, je le remercie à chaque moment du jour ; et les sons de la cloche du hameau ne viennent jamais vibrer à mes oreilles sans que je coure à son saint temple lui demander de m’ouvrir les portes de la céleste patrie. La lecture cette nourriture de l’intelligence, ce support dans l’infortune, cette éponge des larmes du cœur, la lecture a toujours fait mes plus grands délices. La Bible, Virgile et le Télémaque ont toujours été les plus grands amis de mes veilles, j’aime à errer dans le désert, écoutant la voix des patriarches et les paroles d’un Dieu sur la montagne de Sion ; mais suivre Mélibé dans les campagnes qu’arrose le Mincio, ou Télémaque dans la basse Égypte, ramenant les douceurs de l’âge d’or, est aussi chose digne d’envie. Vois, mon fils, c’est ainsi que j’ai vu passer un siècle sur ma tête.


VI


Cependant, le jour que Pierre et Amélie avaient toujours attendu avec une si profonde anxiété, ce jour, où ils devaient prononcer les vœux d’une inséparable union, ce jour qui hélas ! devait fixer leur sort, ce jour, dis-je, ap-