Page:Duranty - La Cause du beau Guillaume.djvu/106

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Il poussa la porte de cette pièce et se trouva en face de Cardonchas et de deux autres paysans.

Il y avait sur la table un énorme broc et trois verres, et à terre une « feuillette » de vin.

La bruyante conversation s’interrompit à l’arrivée de Louis, et les paysans le regardèrent avec leurs petits yeux rusés et inquiets, tout clignotants. Ils étaient à peu près gris tous les trois.

— Ah ! ah ! voila un monsieur qui vient pour le musée, sans doute ? demanda Cardonchas.

Louis eût voulu être seul avec le paysan.

— Vous êtes occupé, je vous dérange, dit-il, je reviendrai un autre jour.

— Eh ! non, ce sont des amis ! vous prendrez bien un verre de vin avec nous, dit familièrement Cardonchas, qui semblait être plein de gaîté.

Louis ne recula pas.

— Même deux, reprit-il pour se faire « bien venir », le vin est bon dans votre pays.

Il examina les compagnons de Cardonchas. L’un, petit, vieux, avec la barbe et les cheveux gris et hérissés, avait l’air sot, malin et méchant. L’autre, grand et plus jeune, avait une physionomie un peu plus ouverte, bien que son œil fût en embuscade sous le sourcil comme chez toute la race paysanne.

— Ah ! s’écria Cardonchas qui considérait attentivement Louis de son côté, mais c’est vous qui êtes dans le pays depuis près de six semaines. Vous êtes du gouvernement, peut-être ? ajouta-t-il avec des yeux scrutateurs.

— Non, répondit Louis, étonné de la question.

— C’est que je ne veux rien vendre au gouvernement, reprit le paysan. Vous êtes artiste, alors ?