Page:Duranty - La Cause du beau Guillaume.djvu/136

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— Oh ! laissez-moi partir, alors ! s’écria-t-elle tremblante, ne me revoyez plus, laissez-moi mourir dans mon coin, cela vaut mieux, car vous ne me croirez jamais maintenant.

La joie de Louis reprit aussitôt son essor. Quel doute pouvait être assez fort pour résister à la sincérité de cette douleur ? Il avait avec lui la lance d’Achille qui guérissait les plaies qu’elle creusait, c’était sa tendresse.

— Vous ne me comprenez pas bien, ma chère Lévise, dit-il, je veux que vous sachiez pourquoi vous m’aimez. Quand vous m’aurez dit pour quelles raisons vous me préférez aux jeunes gens de Mangues qui sont tous beaucoup plus beaux que moi, je serai rassuré et ne craindrai aucun d’eux.

Louis donnait une peine énorme à l’intelligence de Lévise par toutes ses subtilités d’une autre sphère.

— Mais on ne sait pas pourquoi l’on aime ! dit-elle aussi désolée que si elle eût eu affaire à un sphynx prêt à la dévorer, après lui avoir proposé une énigme inexplicable.

Louis sourit, doucement amusé de la petite comédie qu’il allait continuer.

— Enfin, reprit-il, est-ce que vous me trouvez beau ?

— Oui, dit Lévise.

— C’est que vous êtes aveugle ; mais est-ce tout ?

— Non ! répondit la jeune fille d’une façon un peu boudeuse, car elle commençait à entrevoir la tendre moquerie. Mais ce sujet ne lui déplaisait pas non plus. Louis lui faisait voir clair en elle-même.

— Eh bien ! quoi encore ? continua-t-il.

— Vous êtes bon !

— Je n’ai jamais rien fait pour vous, cependant.

— Oh ! si, répliqua Lévise d’un air réfléchi et concen-