Page:Duranty - La Cause du beau Guillaume.djvu/147

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— Ma foi, dit Louis a Cardonchas, j’ai eu une bonne idée d’entrer ici avec Euronique. Je voulais seulement vous acheter une sculpture, mais nous pourrons nous flatter d’avoir vraiment fait d’une pierre deux coups.

Le jeu de mots de Louis ne fut pas immédiatement clair pour Cardonchas qui n’attachait pas une importance décisive à ces propos de mariage. Il ne le releva pas, et saisi au vif dans sa plus forte passion, il entama un grand discours sur les antiquités. Quant à Louis, il lui parut utile d’influencer Euronique et de lui donner bonne opinion du musée en sacrifiant vingt francs à l’achat d’un débris romain ou gothique. Le jeune homme était d’ailleurs enchanté du succès de ses manœuvres.

— Laquelle des sculptures voulez-vous acheter ? demanda Cardonchas en finissant sa grosse dissertation, je sais que vous êtes un fin amateur. Tenez, voici un bas-relief du temple de Junon Volpitrix.

Louis ne savait quelle singulière mythologie imaginait là Cardonchas, mais il ne fit aucune objection et regarda ce que lui montrait le petit danseur : une douzaine de personnages taillés à la queue leu-leu sur une grosse pierre et ayant tous perdu ou la tête, ou le bras, ou la moitié du corps à la bataille du temps.

— Cela vaut cinq cents francs comme deux liards ! dit Cardonchas.

Euronique regarda Louis avec une avide curiosité afin de voir si, confiant dans la valeur des plâtras, il allait offrir les cinq cents francs.

— On n’a encore découvert qu’un seul temple de cette Junon-là, continua Cardonchas, consultez les annales des « arcologues » de la Loire. Tous les morceaux qui en viennent disent un symbole, vous savez, pour un culte qui n’est pas très-connu, aussi ils valent