Page:Duranty - La Cause du beau Guillaume.djvu/201

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

semblait à Volusien une atteinte portée au sien propre, et il était plus disposé à prendre le parti de sa sœur que celui de son camarade. Il se demandait en marchant vers le cabaret de la Bossemartin situé assez loin de Mangues, à l’entrée des bois, s’il ne ferait pas bien d’aller prévenir sa sœur de l’arrivée de Guillaume et des intentions de celui-ci. Il craignait, ne pouvant se faire au fond d’illusion sur la situation de Lévise chez Louis, une aventure fâcheuse. Il était apathique et avait toujours été entraîné dans les rixes par Guillaume.

Le cabaret réunissait les gens qui vivaient des bois, braconniers, bûcherons, charretiers, puis généralement tous les mauvais garnements du pays, les ivrognes, les débauchés, les mendiants, ce qui, dans une petite commune comme Mangues, ne constituait pas d’ailleurs un public considérable, si ce n’est le dimanche.

Le maire eût supprimé ce cabaret sans l’avis de gens qui lui représentèrent qu’il y avait avantage à le laisser ouvert, attendu qu’il délivrait le village des gens turbulents, les concentrait dans un lieu écarté où ils ne battaient et n’injuriaient que leurs pareils et faisaient leur scandale et leur tapage en famille.

Quand Volusien et Guillaume arrivèrent à la Bossemartin, il s’y trouvait quatre autres paysans. L’un de ceux-ci, nommé Bagot, énorme gaillard trapu, était le seul homme du village qui eût une réputation de force égale à celle des deux braconniers, le seul qui ne les craignît pas. Au contraire, il leur avait cherché plus d’une fois querelle. Il passait pour être presque aussi beau que Guillaume. C’était un assez riche vigneron, et un terrible séducteur de filles. Il battait les pères ou les frères qui réclamaient, et si, à cause de ses vignes il était un peu plus considéré, il n’était pas plus aimé ni