Page:Duranty - La Cause du beau Guillaume.djvu/202

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moins redouté que les braconniers. Le cercle de ses exploits d’amour avait été tellement agrandi par la légende locale que, dès qu’il lançait une plaisanterie contre quelqu’un, et la chose arrivait fréquemment parce qu’il était gouailleur et provocateur, on prétendait que Bagot avait passé par la maison de l’individu qu’il raillait. C’était une honte et une mauvaise marque quand on était plaisanté par le terrible Bagot.

En voyant entrer Volusien et Guillaume, Bagot dit :

— Tiens, voila les massacreurs de lapins !

Les braconniers ne répondirent pas et s’installèrent à la table la plus éloignée de celle de Bagot.

Guillaume avait repris le sujet qui le tourmentait, et, bien qu’il parlât à voix basse, quelques mots dits plus haut ou sur un ton irrité montrèrent aux hôtes du cabaret ce dont il s’agissait entre les deux amis.

— Ah ! dit à un moment Guillaume d’une voix rauque qui alla en éclatant, j’aimerais peut-être mieux que Lévise se soit laissée aller avec Bagot que de la voir enjôlée par l’homme de la ville.

Bagot ricana, Guillaume tourna vivement la tête, mais Volusien le détourna de s’occuper du paysan en lui demandant avec surprise : — Qu’y aurait-il de préférable ?

— Eh bien ! reprit Guillaume, les messieurs avec leur argent et leurs redingotes n’ont qu’à se montrer et ils nous enlèvent les filles qui sont à nous. Ils ont tout… tout ! Mais ça se paiera ! ajouta-t-il plus bas.

À cet instant, Cardonchas et Mâcheron entrèrent. Depuis le mariage, non-seulement Euronique avait interdit toute réunion à boire ou à brailler, comme elle disait, mais elle avait pourchassé Cardonchas et Mâcheron jusque dans les cabarets vertueux de Mangues. De sorte que l’archéo-