Page:Duranty - La Cause du beau Guillaume.djvu/305

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Volusien, pour faire croire que les braconniers ne l’avaient pas quittée, qu’ils y rentreraient après le coup, nettoieraient le canon des fusils afin de pouvoir prouver qu’on ne s’en était pas servi, les accrocheraient au râtelier et fumeraient paisiblement leur pipe en gens qui n’ont point songé à se déranger, qu’on n’irait point à la Bossemartin de quelque temps non plus, afin également que personne ne pût témoigner qu’ils fussent sortis du cabaret à une heure proche de celle où ils agiraient.

Grâce à ces moyens, Guillaume déjà persuadé de l’impunité en vertu de son droit, était convaincu qu’aucune preuve ne pourrait être invoquée contre eux. Il pensa même aux recherches qu’on ferait peut-être sur le calibre des balles et la bourre des fusils et crut imaginer un moyen pour rendre ces recherches infructueuses. On mâcherait les balles et on bourrerait avec des feuilles. Enfin on passerait cette même soirée à la Bossemartin et à tous ceux qui parleraient de Louis et des scènes de la journée, on répondrait avec indifférence, comme si on ne s’occupait plus de rien, et que les quelques coups de bâton échangés eussent tout terminé.

Les deux braconniers allèrent donc à la Bossemartin où le dimanche amenait beaucoup de monde, et ils furent assaillis de félicitations et de questions toute la soirée. Ils suivirent exactement leur programme. Guillaume feignit de ne plus prendre aucun intérêt à ce qu’on lui disait. Mais l’impatience battait la charge dans sa poitrine, et comme on lui demandait à chaque instant s’il ne « rattraperait » pas Louis, il faillit plusieurs fois éclater et répondre avec emportement à ceux qui paraissaient douter de lui. Il avait des tentations de les assommer.

Les autres cabarets de Mangues étaient pleins aussi