Page:Duranty - La Cause du beau Guillaume.djvu/84

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ses lectures, et Lévise n’insista pas non plus pour l’entendre.

Le dimanche approchant, Lévise prévint Louis qu’elle ne viendrait pas le jour du repos.

Louis passa comme une âme en peine son dimanche. Il avait toujours peur que Lévise ne revînt plus.

Il remplit, tant bien que mal, quelques heures par des rêvasseries, des souvenirs, par des impatiences, des soupirs même. Mais le soir une distraction devint nécessaire. On était en mai, à l’époque où les jours sont longs, et à Mangues, le dimanche, on dansait sur l’herbe jusqu’à la nuit.

Louis se rendit au Mail, où tout le village était réuni sous les arbres.

Louis avait vu cent fois des fêtes de campagne, mais celle de Mangues excitait plus particulièrement son intérêt.

Au Mail, grande pelouse entourée de châtaigniers, deux joueurs de violon, perchés sur une charrette, animaient toutes les jambes. Les filles étaient pavoisées de rubans et de dentelles, les garçons en belle veste propre avaient arboré les chapeaux ronds en soie bleue. Les rires, les cris joyeux s’élevaient de tous les côtés. Les petites paysannes fraîches sous leurs bonnets admirablement blancs se promenaient deux par deux, trois par trois, se moquant des gros compliments que leur faisaient leurs amoureux. Les vieux étaient attablés à la porte d’un cabaret qui avait pour enseigne une énorme botte de genêts à fleurs jaunes. La petite rivière de Mangues, qu’on voyait plus loin briller à travers les troncs d’arbres, faisait assez de tapage sur son lit de cailloux pour qu’on l’entendît quand les violons s’arrêtaient.

Louis se plaça derrière le rang des spectateurs qui entouraient la danse et contempla le balancement des