Madame Germain parut surprise son : fils rentrait avant l’heure ordinaire.
« D’où viens-tu donc, lui dit-elle, pour t’être mis dans ce bel état ? Tu n’es pas allé à la préfecture.
— Moi, je viens des Tournelles.
— C’est cela, tu perds ton temps. Ah ! tu ne veux pas m’écouter. Tu compromets ton avenir ! J’ai pris des renseignements sur les Gérard.
— Eh bien ?
— Tu ferais mieux de ne plus penser à tout cela. Tu abandonnerais tout pour une fantaisie qui te passe par la tête ! Tu es bien peu raisonnable.
— Mais, si j’aime Henriette, dit Émile, je pourrais l’épouser.
— Ce sont des enfantillages.
— Non, c’est sérieux, je me marierais avec elle !
— Ah ! cela t’est venu du soir au lendemain.
— Quel mal y aurait-il à ce que cela se fî ? On voit bien que tu ne la connais pas.
— Et tu la connais, toi, mon pauvre enfant ? Tu ne sais donc pas que ça amuse les jeunes filles de faire courir les garçons sur la grande route ?
— Il est inutile d’en dire du mal avant de la connaître, reprit Émile presque indigné.
— Mais, dit la mère, vous vous êtes à peine vus ; je ne peux rien trouver de sérieux là-dedans, malgré toute ma bonne volonté. Et puis une jeune fille qui donne des rendez-vous au premier venu, comme cela promet pour l’avenir !
— Oh ! le premier venu ! s’écria Émile, que tout froissait dans ce nouvel entretien. Et quant à des rendez-vous, ajouta-t-il, elle ne m’en a pas donné.
— Alors tu n’y retourneras plus ? dit madame Germain avec un air de doute doucement moqueur.
— Si, j’y retournerai.
— Oui, mais elle ne t’attendra pas, n’est-ce pas ?
— Enfin dit Émile, nous ne nous sommes pas donné de rendez-vous. J’aime mieux n’en plus parler que d’entendre toutes ces choses-là : « Comme ça promet pour l’avenir ! »