Page:Duranty - Les Combats de Françoise du Quesnoy.djvu/132

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fait, ai-je mal fait ? jusque ce qu’une voix protectrice qui de temps en temps lui criait : Fais ton devoir, lui eût répété avec insistance : Tu t’es bien conduit.

Néanmoins le soir deux lettres se croisaient, écrites par des esprits mal rassérénés et surtout étonnés encore du soudain débordement qui les avait entraînés.

Allart, appuyant sa tête brûlante contre le marbre de sa cheminée, contemplait avec un sourire de béatitude une petite feuille de papier couverte de fins caractères

« Je ne puis que me réjouir de ce qui s’est passé ce matin entre nous. La réserve à laquelle j’ai toujours voué un culte absolu a cessé tout à coup d’être sacrée pour moi. J’en suis satisfaite, bien satisfaite. Par ma seule volonté, je n’aurais jamais pu me décider à vous livrer ainsi mon cœur. Un hasard, une souffrance imprévue, comme la vie nous en apporte cependant si souvent, m’a jetée sur votre sein, pour y pleurer et appeler un secours. Vous m’avez vue bien folle, bien peu maîtresse de moi-même. J’ai réfléchi toute la journée à ma conduite, craignant d’avoir à en rougir. Non, mon bien cher ami, j’en suis heureuse.

« Peut-être sans cette surprise ou plutôt cet élan que m’a donné une cause extérieure, vous n’auriez jamais bien connu ma pensée, mes sentiments. Je suis d’ordinaire extrêmement timide pour tout ce qui tient à la sensibilité, j’ai peur qu’on ne me suspecte. Et je veux que vous sachiez bien comment je suis faite et quel est mon malheur ; peut-être ne retrouverez-vous jamais en moi la femme que vous avez pressée contre votre poitrine et qui a posé sa joue contre la vôtre. Ainsi, même