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Page:Duras - Ourika et Édouard, II.djvu/106

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LE MARCHAND DE ZAMORA.

grande jeunesse, le seigneur Pedro. Il n’avait que vingt-cinq ans ; c’était l’âge du fils de Gavino. Antagoniste de mon ami dans ses chimères vaniteuses, je me mis alors à dire : — Ne peut-il donc jamais se faire que la fortune soit aussi folle que nos projets ? Je trouvai d’ailleurs piquant de voir Pedro en chemin d’écrire un jour dans l’histoire les rêves de son père. Il est vrai que la gazette ajoutait au nom de Pedro celui de Castella, et ceci me déroutait un peu. — Mais bah ! Pedro, cédant aux petitesses des parvenus, aura, du haut de sa fortune nouvelle, embelli son nom, pour que rien ne rappelle les jours de son obscurité, pas même sa signature. J’écrivis donc à tout hasard au colonel don Pedro de Castella. Point de réponse. — Allons, dis-je, attendons que mon cher Pedro, si toutefois c’est le mien, devienne général ; alors je monterai sur une de mes mules pour aller le complimenter à la tête de son armée.

« Dix ans s’étaient écoulés depuis la mort de Gavino, lorsque j’eus besoin de me rendre à Madrid. En route pour cette ville, j’arrivai dans un village bâti au milieu d’une plaine, la plus belle de l’univers. Il me prit fantaisie de l’admirer à loisir, d’attendre l’heure où le soleil le saluerait de ses derniers rayons. Pendant qu’on préparait mon dîner à l’hôtellerie où j’étais descendu, je sortis pour visiter d’abord le village. Cette promenade avait aussi un but d’utilité ; ma barbe