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LE MARCHAND DE ZAMORA.

et tant à la fois qu’il ne savait à laquelle répondre.

« Nous parlerons de tout cela à table, lui dis-je ; viens, viens dîner avec moi. »

« Il ferma sa boutique. Nous voilà cheminant vers mon hôtellerie. Je courus à la cuisine pour faire doubler mon repas, pour le changer, s’il était possible, en festin. Pendant ce temps, Fabrice, qui m’avait suivi, regardait un soldat debout, mais pas trop d’aplomb sur sa jambe de bois, et buvant dans un verre grossier un vin plus grossier encore. — Ce soldat t’occupe, lui dis-je, le connais-tu ? — Il me semble… je le crois, du moins, à mon cœur… Le soldat, qui entend parler de lui, se retourne. — Mille bombes ! s’écria-t-il, voilà un barbier pareil de tout points mon frère. — Voilà un soldat terriblement façonné sur le modèle de Pedro. — Pedro ! c’est mon nom — Ton nom ? quoi ! c’est toi ? — Et toi aussi, mon frère ! Et les voilà se précipitant dans les bras l’un de l’autre, et me voilà courant à eux, me mêlant à leurs embrassements, pleurant, riant, m’écriant : — C’est donc là notre général ? — Sergent, me répondit Pedro, et sans ma jambe de bois… — Et où allais-tu ? dit le barbier. — À Madrid, te chercher, répondit l’invalide. Sans attendre de nouvelles questions, je les emmène tous deux au salon, où nous nous mettons à table. La joie double et triple notre appétit.

« Le repas fini, les questions recommencent.