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Page:Duras - Ourika et Édouard, II.djvu/47

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ÉDOUARD.

mille détails que personne depuis longtemps n’avait pu lui apprendre ; mais j’éprouvais un sentiment de souffrance inexprimable en me sentant si étranger à ce monde, dans lequel madame de Nevers allait de nouveau passer sa vie. Le prince d’Enrichemont conta que la reine avait dit qu’elle espérait que madame de Nevers serait de retour pour le premier bal qu’elle donnerait à Trianon. Le duc de L. parla du voyage de Fontainebleau qui venait de finir. Je ne pouvais m’étonner que madame de Nevers s’occupât de personnes qu’elle connaissait, de la société dont elle faisait partie ; mais cette conversation était si différente de celles que nous avions ordinairement ensemble, qu’elle me faisait l’effet d’une langue inconnue, et j’éprouvais une sensation pénible en voyant cette langue si familière à celle que j’aimais. Hélas ! j’avais oublié qu’elle était la sienne, et le doux langage de l’amour que nous parlions depuis si longtemps avait effacé tout le reste. Le duc de L. qu’on ne fixait jamais longtemps sur le même sujet revint à parler de Faverange, et s’engoua de tout ce qu’il voyait, de l’aspect du château par le clair de la lune, de l’escalier gothique, surtout de la salle où nous étions. Il admira la vieille boiserie de chêne, noir et poli comme l’ébène, qui portait dans chacun de ses panneaux un chevalier armé de toutes pièces, sculpté en relief, avec le nom et