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Page:Duras - Ourika et Édouard, II.djvu/71

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ÉDOUARD.

sa réputation injustement flétrie ! Elle, pure comme les anges du ciel, verrait son nom associé à ceux de ces femmes perdues, objets de son propre mépris ! et c’était moi, moi seul, qui versais cet opprobre sur sa tête ! La douleur et le désespoir s’étaient emparés de moi à un tel point que l’idée de la vengeance pouvait seule en ce moment m’empêcher de m’ôter la vie. Je balançais si j’irais chez le duc de L. avant de parler à madame de Nevers, lorsque j’entendis sonner avec violence les sonnettes de son appartement ; un mouvement involontaire me fit courir de ce côté ; un domestique m’apprit que madame de Nevers venait de se trouver mal, et qu’elle était sans connaissance. Glacé d’effroi, je me précipitai vers son appartement ; je traversai deux ou trois grandes pièces sans savoir ce que je faisais, et je me trouvai à l’entrée de ce même cabinet où la veille encore nous avions osé croire au bonheur. Madame de Nevers était couchée sur un canapé, pâle et sans mouvement. Une jeune femme que je ne connaissais point la soutenait dans ses bras ; je n’eus que le temps de l’entrevoir. M. le maréchal d’Olonne vint au-devant de moi. « Que faites-vous ici ? me dit-il d’un air sévère, sortez. — Non, lui dis-je ; si elle meurt, je meurs. » Je me précipitai au pied du canapé. M. le maréchal d’Olonne me releva. « Vous ne pouvez rester ici, me dit-il ; allez dans votre