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Page:Duras - Ourika et Édouard, II.djvu/98

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LE MARCHAND DE ZAMORA.

« À défaut de bibliothèque, j’avais quelques volumes épars chez moi, dans une chambre inhabitée. Ils faisaient partie de l’héritage d’un vieux parent. Je ne m’en servais guère ; mes livres de commerce sont ceux où je lis avec le plus de complaisance ; les autres ne sont pour moi qu’une distraction.

« Parmi ces volumes, Gavino en prit un au hasard, qu’il emporta : c’était l’histoire d’un maréchal de France, écrite par un évêque, commentée par un chanoine ; la traduction en espagnol était d’un bénédictin.

« Le lendemain, devançant l’heure accoutumée, Gavino vint chez moi. La joie illuminait son visage. — Mon ami, me dit-il, plus d’indécision j’ai trouvé, j’ai choisi pour mon fils une carrière. J’ai lu… La belle chose qu’un livre ! comme il vous ouvre un monde nouveau ! comme il chasse vos propres idées pour vous donner celles des autres ! Mon cher voisin, si vous lisiez davantage, vous finiriez par ne plus songer à votre commerce. — Mais expliquez-moi, lui dis-je… Ayant regardé de tous côtés pour bien s’assurer que personne ne pouvait l’entendre, il frappa sur le volume en s’écriant : — Voilà la vie de Pedro ; voilà son sort ! — Fort bien, mais que sera-t-il ? — Lieutenant général des armées du roi. — Lieutenant-général des armées du roi ! — Vous ne vous attendiez guère à cette nouvelle ; le poste est brillant. —