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sont en Allemagne, en Angleterre ou aux États-Unis. Son enseignement secondaire porte sur le français, les langues classiques, les langues vivantes, l’histoire, les sciences ; vers 1600, il portait exclusivement suf le latin et le grec ; au moyen âge, sur la dialectique. Notre enseignement fait une part à la méthode intuitive et expérimentale ; celui des États-Unis une part bien plus grande ; l’éducation médiévale et humaniste était exclusivement livresque. Or, il est clair que les institutions scolaires, les disciplines, les méthodes sont des faits sociaux. Le livre lui-même est un fait social ; le culte du livre, le déclin de ce culte dépendent de causes sociales. On ne voit pas comment la psychologie pourrait en connaître. L’éducation physique, morale, intellectuelle, que donne une société, à un moment de son histoire, est manifestement du ressort de la sociologie. Pour étudier scientifiquement l’éducation, comme un fait donné à l’observation, la sociologie doit collaborer avec la psychologie. Sous l’un de ses deux aspects, la science de l’éducation est une science sociologique. C’est de ce biais que Durkheim l’abordait.

Ce faisant, il frayait une voie nouvelle, poussé par la logique interne de sa propre pensée, précurseur, et non imitateur, de doctrines aujourd’hui fort en vogue, que la sienne dépasse en netteté et en fécondité. L’Allemagne a créé le terme Sozialpadagogik, les États-Unis, le terme Educational Sociology, qui marquent, assurément la même tendance[1]. Mais, sous ces mots, se mêlent encore souvent des choses bien distinctes, par exemple, d’une part, une orientation plus ou moins incertaine vers l’étude sociologique de l’éducation, telle

  1. Paul Natorp, Sozialpädagogik, Theorie der Willenserziehung auf der Grundlage der Gemeinschaft, 3. Auft., Stuttgart, 1909 (la 1re éd. est de 1899). — Voir les définitions de l’Educational Sociology dans Monroe, A Cyclopedia of Education, t. V p. 361.