Page:Durkheim - Éducation et sociologie.djvu/17

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que Durkheim la conçoit, et, d’autre part, un système d’éducation qui se préoccupe plus particulièrement de préparer l’homme à la vie sociale, de former le citoyen : Staatsbürgerliche Erziehung, comme l’appelle Kerschensteiner[1]. L’idée américaine d’Educational Sociology s’applique confusément à l’étude sociologique de l’éducation et, en même temps, à l’introduction de la sociologie dans les classes, comme matière d’enseignement. La science de l’éducation, définie par Durkheim, est sociologique, dans une acception beaucoup plus claire du terme.

Quant à ce qu’il entend par Pédagogie, ce n’est ni l’activité éducative elle-même, ni la science spéculative de l’éducation. C’est la réaction systématique de la seconde sur la première, l’œuvre de la réflexion qui cherche, dans les résultats de la psychologie et de la sociologie, des principes pour la conduite ou pour la réforme de l’éducation. Ainsi conçue, la pédagogie peut être idéaliste, sans verser dans l’utopie.

Que bon nombre de pédagogues illustres aient cédé à l’esprit de système, assigné à l’éducation un but inaccessible ou arbitrairement choisi, proposé des procédés artificiels, non seulement Durkheim ne le nie pas, mais il met mieux en garde que quiconque contre leur exemple. La sociologie combat ici l’ennemi qu’elle a l’habitude de trouver en face d’elle : dans tous les domaines, en morale, en politique, même en économie politique, l’étude scientifique des institutions a été précédée par une philosophie essentiellement artificialiste, qui prétendait formuler des recettes pour assurer aux individus ou aux peuples le maximum de bonheur, sans connaître d’abord suffisamment leurs conditions d’existence. Rien n’est plus

  1. Der Begriff der staatsbürgerlichen Erziehung, 4te Aufl. Berlin et Leipzig, 1921 (?).