Page:Durkheim - De la division du travail social.djvu/145

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classes de règles qui déterminent les uns et les autres correspondent deux sortes de solidarité sociale qu’il est nécessaire de distinguer.


II


Le rapport négatif qui peut servir de type aux autres est celui qui unit la chose à la personne.

Les choses, en effet, font partie de la société tout comme les personnes, et y jouent un rôle spécifique ; aussi est-il nécessaire que leurs rapports avec l’organisme social soient déterminés. On peut donc dire qu’il y a une solidarité des choses dont la nature est assez spéciale pour se traduire au dehors par des conséquences juridiques d’un caractère très particulier.

Les jurisconsultes, en effet, distinguent deux sortes de droits : ils donnent aux uns le nom de réels, aux autres celui de personnels. Le droit de propriété, l’hypothèque, appartiennent à la première espèce : le droit de créance à la seconde. Ce qui caractérise les droits réels, c’est que seuls ils donnent naissance à un droit de préférence et de suite. Dans ce cas, le droit que j’ai sur la chose est exclusif de tout autre qui viendrait à s’établir après le mien. Si, par exemple, un bien a été successivement hypothéqué à deux créanciers, la seconde hypothèque ne peut en rien restreindre les droits de la première. D’autre part, si mon débiteur aliène la chose sur laquelle j’ai un droit d’hypothèque, celui-ci n’est en rien atteint, mais le tiers-acquéreur est tenu ou de me payer, ou de perdre ce qu’il a acquis. Or, pour qu’il en soit ainsi, il faut que le lien de droit unisse directement, et sans l’intermédiaire d’aucune autre personne, cette chose déterminée à ma personnalité juridique. Cette situation privilégiée est donc la conséquence de la solidarité propre aux choses. Au contraire, quand le droit est personnel, la personne qui est obligée envers moi peut, en contractant des obligations nouvelles, me donner