Page:Durkheim - De la division du travail social.djvu/152

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

dont la société peut très bien se passer. Beaucoup même ne la voient pas sans inquiétude intervenir dans la vie publique. On voit par ce qui précède combien cette conception est peu d’accord avec les faits. En réalité, pour que les hommes se reconnaissent et se garantissent mutuellement des droits, il faut d’abord qu’ils s’aiment, que, pour une raison quelconque, ils tiennent les uns aux autres et à une même société dont ils fassent partie. La justice est pleine de charité, ou, pour reprendre nos expressions, la solidarité négative n’est qu’une émanation d’une autre solidarité de nature positive : c’est la répercussion dans la sphère des droits réels de sentiments sociaux qui viennent d’une autre source. Elle n’a donc rien de spécifique, mais c’est l’accompagnement nécessaire de toute espèce de solidarité. Elle se rencontre forcément partout où les hommes vivent d’une vie commune, que celle-ci résulte de la division du travail social ou de l’attrait du semblable pour le semblable.

III


Si du droit restitutif on distrait les règles dont il vient d’être parlé, ce qui reste constitue un système non moins défini qui comprend le droit domestique, le droit contractuel, le droit commercial, le droit des procédures, le droit administratif et constitutionnel. Les relations qui y sont réglées y sont d’une tout autre nature que les précédentes ; elles expriment un concours positif, une coopération qui dérive essentiellement de la division du travail.

Les questions que résout le droit domestique peuvent être ramenées aux deux types suivants :

1o Qui est chargé des différentes fonctions domestiques ? Qui est époux, qui père, qui enfant légitime, qui tuteur, etc. ?

2o Quel est le type normal de ces fonctions et leurs rapports ?

C’est à la première de ces questions que répondent les dispo-