Page:Durkheim - De la division du travail social.djvu/153

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sitions qui déterminent les qualités et les conditions requises pour contracter mariage, les formalités nécessaires pour que le mariage soit valable, les conditions de la filiation légitime, naturelle, adoptive, la manière dont le tuteur doit être choisi, etc.

C’est au contraire la seconde question que résolvent les chapitres sur les droits et les devoirs respectifs des époux, sur l’état de leurs rapports en cas de divorce, de nullité de mariage, de séparation de corps et de biens, sur la puissance paternelle, sur les effets de l’adoption, sur l’administration du tuteur et ses rapports avec le pupille, sur le rôle du conseil de famille vis-à-vis du premier et du second, sur le rôle des parents dans les cas d’interdiction et de conseil judiciaire.

Cette partie du droit civil a donc pour objet de déterminer la manière dont se distribuent les différentes fonctions familiales et ce qu’elles doivent être dans leurs mutuelles relations ; c’est dire qu’il exprime la solidarité particulière qui unit entre eux les membres de la famille par suite de la division du travail domestique. Il est vrai qu’on n’est guère habitué à envisager la famille sous cet aspect ; on croit le plus souvent que ce qui en fait la cohésion, c’est exclusivement la communauté des sentiments et des croyances. Il y a en effet tant de choses communes entre les membres du groupe familial que le caractère spécial des tâches qui reviennent à chacun d’eux nous échappe facilement ; c’est ce qui faisait dire à A. Comte que l’union domestique exclut « toute pensée de coopération directe et continue à un but quelconque[1] ». Mais l’organisation juridique de la famille, dont nous venons de rappeler sommairement les lignes essentielles, démontre la réalité de ces différences fonctionnelles et leur importance. L’histoire de la famille à partir des origines n’est même qu’un mouvement ininterrompu de dissociation au cours duquel ces diverses fonctions, d’abord indivises et confondues les unes dans les autres, se sont peu à peu sépa-

  1. Cours de philosophie positive IV, p. 419.