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LE SUICIDE ALTRUISTE.

goiit du service. Cette explication concorde aVec la conception courante qui attribue le suicide aux difficultés de l’existence; car les rigueurs de la discipline, Tabsence de liberté, la priva- tion de tout confortable font que Ton est enclin à regarder la vie de caserne comme particulièrement intolérable. A vrai dire, il semble bien qu’il y ait beaucoup d’autres professions plus rudes et qui, pourtant, ne renforcent pas le penchant au suicide. Du moins, le soldat est toujours assuré d’avoir un gîte et une nour- riture suffisante. Mais, quoi que vaillent ces considérations, les faits suivants démontrent Tinsuffisance de cette explication sim- pliste : l"" Il est logique d’admettre que le dégoût du métier doit être beaucoup plus prononcé pendant les premières années de ser- vice et aller en diminuant à mesure que le soldat prend l’habi- tude de la vie de caserne. Au bout d’un certain temps, il doit se produire un acclimatement, soit par l’effet de l’accoutumance, soit que les sujets les plus réfractaires aient déserté ou se soient tués; et cet acclimatement doit devenir d’autant plus complet que le séjour sous les drapeaux se prolonge davantage. Si donc c’était le changement d’habitudes et l’impossibilité de se faire à leur nouvelle existence qui déterminaient l’aptitude spéciale des soldats pour le suicide, on devrait voir le coefficient d’ag- gravation diminuer à mesure qu’ils sont depuis plus longtemps sous les armes. Or il n’en est rien, comme le prouve le tableau qui suit : ARMEE FRANÇAISE [î Ayant moins d’un an de service De 1 an à 3 De 3 ans à 5 De 5 ans à 7 De 7 ans à 10 SoQS-offleiers et soldats^ Suicides annuels pour 100.000 sujets (1862-09. ARMEE ANGLAISE Suicides par 400.000 sujets. Age. -25 ans. 25-30 — 30-35 — 35-40 — Dans la métropole.

39 51 71 Dans l’Inde.