Aller au contenu

Page:Durkheim - Le Suicide, Alcan, 1897.djvu/450

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

428 LK sujcid::. pas tirer du néant des forces qui ne sont pas et les échecs de l’expérience viennent toujours dissiper ces faciles illusions. D’ailleurs, quand même, par un miracle inintelligible, un système pédagogique parviendrait à se constituer en antago- nisme avec le système social, il serait sans effet par suite de cet antagonisme même. Si l’organisation collective, d’où résulte l’état moral que Ton veut combattre; est maintenue, l’enfant, à partir du moment où il entre en contact avec elle, ne peut pas n’en pas subir l’influence. Le milieu artificiel de l’école ne peut le préserver que pour un temps et faiblement. A mesure que la vif3 réelle le prendra davantage, elle viendra détruire l’œuvre de l’éducateur. L’éducation ne peut donc se réformer que si la société se réforme elle-même. Pour cela, il faut atteindre dans ses causes le mal dont elle souffre. Or, ces causes, nous les connaissons. Nous les avons déter- minées quand nous avons fait voir de quelles sources découlent les principaux courants suicidogènes. Cependant, il en est un qui n’est certainement pour rien dans le progrès actuel du sui- cide; c’est le courant altruiste. Aujourd’hui, en effet, il perd du terrain beaucoup plus qu’il n’en gagne; c’est dans les sociétés inférieures qu’il s’observe de préférence. S’il se maintient dans l’armée, il ne semble pas qu’il y ait une intensité anormale; car il est nécessaire, dans une certaine mesure, à l’entretien de l’esprit militaire. Et d’ailleurs, là même, il va de plus en plus en déclinant. Le suicide égoïste et le suicide anomique sont donc les seuls dont le développement puisse être regardé comme morbide, et c’est d’eux seuls, par conséquent, que nous avons à nous occuper. Le suicide égoïste vient de ce que la société n’a pas sur tous les points une intégration suffisante pour maintenir tous ses membres sous sa dépendance. Si donc il se multiplie outre me- sure, c’est que cet état dont il dépend s’est lui-même répandu à l’excès; c’est que la société, troublée et affaiblie, laisse échap- per trop complètement à son action un trop grand nombre de sujets. Par conséquent, la seule façon de remédier au mal, est