Page:E. Daudet - Le Duc de Broglie, 1883.djvu/32

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à quoi bon gémir ? On nous a jetés maladroitement à l’eau ; il faut nager.

Le maréchal lui offrit la direction du pouvoir dans ces circonstances difficiles, et il l’accepta. Eut-il raison ? Eut-il tort ? Il n’y a pas lieu de répondre à cette question, et la vérité oblige à reconnaître que ce qu’il fit, il ne pouvait pas ne pas le faire. Personne ne lui eût su gré de refuser le gouvernement. Quand on appartient à un grand parti, quand on y tient la première place, on se doit à ses amis, alors même qu’ils se trompent. Il ne faut pas qu’ils puissent vous accuser un jour d’avoir, par un refus de concours, fait avorter leur tentative, et c’est surtout en politique que sera éternellement vrai ce mot de Casimir Perier, qu’au 16 mai, le maréchal pouvait s’approprier : « Ce n’est pas quand j’ai raison que j’ai besoin de mes amis ; c’est quand j’ai tort. »

Redevenu premier ministre, le duc de Broglie joua cette grave partie comme s’il avait eu foi dans le succès. Les polémiques du moment se plurent à le comparer à M. de Polignac et à chercher des ressemblances entre 1877 et 1830. Les partisans du 16 mai ont conservé le droit de dire que ces ressemblances n’existaient pas,