Page:E. Daudet - Le Duc de Broglie, 1883.djvu/33

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et que si M. de Polignac s’était mis en révolte ouverte contre le corps électoral, le duc de Broglie, après les élections qui avaient condamné la politique dont il s’était fait l’instrument, se retira. Il se retira, non sans avoir donné des preuves nouvelles de son merveilleux talent d’orateur, qui ne s’est jamais élevé plus haut que durant les luttes de tribune qui eurent lieu à cette époque.

C’est peut-être le cas d’apprécier ici ce talent viril auquel, depuis dix ans, les nombreux incidents de la vie publique du duc de Broglie ont apporté des forces nouvelles. Le duc de Broglie est né orateur. Cela est si vrai qu’il est même parvenu à surmonter des difficultés propres à éteindre une inspiration moins sûre d’elle-même que la sienne. L’organe est mauvais, la voix mal posée, facilement étranglée dans la gorge ; la prononciation défectueuse, parfois embarrassée. Mais ces défauts de nature n’enlèvent rien à la puissance de l’inspiration, à la sûreté de la pensée, à la solidité des arguments, à la beauté du langage. Quand il monte à la tribune, le duc de Broglie sait ce qu’il veut dire et il le dit bien. Contrairement à la plupart des grands rhéteurs, qui ne réservent