« Qui suis-je pour raconter ce qui n’est pas encore, ce qui peut-être ne sera jamais ailleurs que dans mes songes ?
« Qui m’assure que j’habiterai les palais retentissants de l’avenir ? Qui m’a dit : Voici les clefs, ouvre, entre ; ils sont à toi ?
« La terre ne me l’a pas dit ; et le ciel, quand s’est-il confié à moi de ses secrets ?
« Est-ce le jour où je suis né de l’enfer ? Est-ce celui où je suis descendu dans les gouffres des maudits ?
« Ai-je appris le secret de la justice avec les damnés, dans les lieux souterrains où il n’y a point d’espoir ?
« Abandonné de ceux qui m’ont aimé, j’erre parmi des fantômes qui ne me connaissent pas ; sur moi planent les vautours homicides qui portent un joug d’or. »
En l’entendant parler ainsi, tous ceux qui étaient là se réjouirent ; ils murmuraient entre eux :
« Voilà qui va bien ! il se décourage, il désespère. Maintenant nous le vaincrons sans peine. »
Alors Merlin :
« Où est l’ombre de mon verger aux pommes d’or, dans l’île Bienheureuse ? Qu’ils étaient beaux mes arbres sacrés, lorsque la plus belle des belles, aux longues tresses, aux dents blanches de perle, veillait sur eux et sur moi ! »
« Bon ! le voilà qui prophétise. Que veut-il dire avec