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LIVRE XV.

deux des principaux de mes bardes. René sera le premier et il viendra de France. Harold sera le second et il viendra de Bretagne. Si la victoire est incertaine, j’arriverai moi-même. Ne craignez pas alors d’attaquer Mahomet, le prophète. Car, moi aussi, je suis prophète. Écoutez. »

Le cercle de la foule se resserra autour de Merlin ; il continua ainsi :

« Prophétie de Merlin sur la Morée et sur les Îles.

« Ô terre sacrée, tu es le trépied, je suis le barde. Je publierai d’avance ta victoire.

« Pourquoi ne suis-je pas né sur tes cimes ? Jamais la tristesse n’aurait approché de moi. Quand le vent d’hiver souffle sous mon toit, si ton nom seulement est prononcé, je souris même dans les pleurs, même dans la fièvre, dans l’attente de la mort. C’est ainsi qu’une coupe vide, si on la remplit d’un vin empourpré de Corinthe, sourit à l’échanson.

« Un cri partira des ruines de Caritène et toute la terre s’éveillera en sursaut. Les tombeaux de Mistra enfanteront des klephtes, dont les flèches seront cent fois plus rapides que les flèches d’Ulysse. Le lion de Némée rugira ; sa voix sera entendue dans la caverne de Souli.

« Les anémones des montagnes d’Arcadie seront enivrées de sang.

« Déjà je pourrais dire comment s’appelleront les chefs de guerre qui éveilleront la poussière des ancêtres. Je sais d’avance leur nom ; il plaît à mon oreille.

« J’ai entendu hier le dialogue de l’Olympe et de l’Œta.