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MERLIN L’ENCHANTEUR.

À Burgos, il reçut l’hospitalité du grand Cid de Bivar et de Chimène. Tous deux l’attendaient au seuil, près du petit arc triomphal, sur des chevaux piaffants, caparaçonnés de soie et d’or. Fêté dans leur château, qui dominait la plate-forme, il paya leur hospitalité en composant plusieurs romances à leur éloge, et il mit le diadème de pierre sur le front chenu de la tour de Burgos-la-vieille.

Quand Merlin eut atteint la frontière de France l’honorée, il pressa encore le pas. Les âniers et les muletiers, qui lui faisaient cortége en grand nombre, ne pouvaient se décider à se séparer de lui.

« Que deviendrons-nous ? disaient-ils. Déjà l’ennui nous gagne. Car nous commençons à nous apercevoir que nous sommes très-misérables, et nous l’avions oublié en vous voyant.

— Je reviendrai, seigneurs âniers.

— Cela est-il sûr ?

— N’en doutez point.

— Si vous ne pouvez rester avec nous, laissez-nous au moins votre serviteur que voici. »

Et ils montraient Jacques Bonhomme. Jacques refusa de se séparer, un seul moment, de son maître. Tout ce qu’il put faire, fut d’offrir à ces bonnes gens de leur laisser son chien noir.

« Il sait aussi beaucoup de magie, » dit-il.

Le chien, voyant Jacques s’éloigner, poussa de si lamentables cris que les Pyrénées en retentirent, et il alla rejoindre son maître.