Page:E. Quinet - Merlin l'Enchanteur tome 2, 1860.djvu/210

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
206
MERLIN L’ENCHANTEUR.

« Faisons d’abord maison nette. Reprenons, emportons, dispersons tous les enchantements que Merlin a répandus sottement sur le monde.

— C’est trop juste, Serpentin ! Je me charge, dit Farfarel, de dévaliser de mes propres mains la cour d’Arthus, et les palais et les chaumières. Pas un breuvage d’amour ne restera dans une coupe. Non, non ! je n’en laisserai pas une goutte pour désaltérer un papillon.

— Et moi, cousin, je rouillerai les armures ! s’écria Fleur de verveine qui brandissait déjà un brin de paille chargé de rosée.

— Moi, j’effacerai les mots sacrés dans le livre des Ermites.

— Moi, j’ôterai le charme des vieilles tours couronnées de lierre. Je n’y laisserai que le chat-huant : il est de nos amis. Ah ! si nous pouvions, du même coup, désenchanter les étoiles amoureuses dans les nuits de printemps ! Voyez ! elles sourient et se moquent de nous. Prenez-y garde, elles feront encore bien des dupes.

— Nous finirons par les atteindre, répondit Farfarel en même temps qu’il éteignit sa lampe.

— Bon ! voilà déjà une étoile de moins ! Il serait utile aussi de désenchanter l’enfer. Croyez-moi ! il reste là plus d’une illusion.

— Sois tranquille. Serpentin, reprit encore Farfarel qui semblait le roi des esprits follets. Je m’en charge, et retiens bien cette parole. Pour commencer, je chasserai les revenants dès minuit. Je les obligerai, à coups