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LIVRE XIX.

de fouet, de rentrer honnêtement dans leurs couches ; je fermerai sur eux la pierre. »

À ces mots il vint se placer debout en face de Jacques Bonhomme, et, en se dandinant, il ajouta :

« Et toi, Jacques, viens-tu avec nous ?

— Quitter le seigneur Merlin ! repartit l’honnête Jacques, qui semblait familier avec cette troupe d’esprits ! pour qui me prenez-vous ?

— Imbécile ! s’écria la foule des esprits follets. Allons chercher un autre enchanteur, s’il y en a encore dans le monde, et soyons les premiers à lui faire notre cour à son lever. Le temps de Merlin est fini ! »

Puis ils se dispersèrent, en ricanant, sur tous les royaumes de Merlin, comme les nuages de sauterelles noires qui s’abattent, en Roumanie, sur les océans de blés et en dévorent les épis déjà mûrs.

Jacques suivit longtemps des yeux les fugitifs. Toutefois il ne fut point ébranlé ce jour-là. Quelques mots de la conversation des esprits, de Farfarel et de Brin-d’herbe d’or furent entendus par des paysans des Ripes qui rentraient de la moisson. Ces mots, pour la plupart entrecoupés, commencèrent à circuler dans le monde. Mais personne n’y prêta la moindre attention.