Page:E. Quinet - Merlin l'Enchanteur tome 2, 1860.djvu/235

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
231
LIVRE XIX.

ter. Les plus belles personnes vinrent trouver Merlin ; c’étaient, après Genièvre, Iseult aux blanches mains, Sigune, sœur d’Amfortès, Brunissende, Orbance l’angélique ; de crainte de faire trop de bruit, elles avaient eu soin de faire déferrer leurs palefrois.

« Au moins, lui disaient-elles, vous veillerez sur nous ; si vous ne nous donniez votre parole, nous aurions peur vraiment.

— Dormez sans peur, » leur répondait Merlin.

Et Floramie, la fiancée de Titurel, Amide, surnommée Héliabelle, Hélène sans pareille, au cœur dolent, reprenaient :

« Nous nous fions à vous, seigneur ! quand le moment viendra, réveillez-nous sans faute, nous sommes très-matinales.

— Foi d’enchanteur ! je vous réveillerai à l’heure propice. Dormez votre sommeil magique. »

Et tout ce que l’on comptait de plus charmant à la cour d’Arthus s’endormit à la belle étoile dans les cavernes, sur la mousse ou sur des lits de feuilles, pour être plus vite prêt à l’appel du matin ; et l’une avait les mains jointes sur la poitrine, l’autre les avait collées au corps ; celle-ci avait la tête sur un oreiller de granit qui ployait à son gré ; celle-ci avait préféré le marbre parce qu’il a la blancheur des vierges ; cette autre le porphyre. Toutes avaient pris d’épais linceuls d’écarlate à cause du vent des nuits dont aucun toit ne les garantissait.

Ainsi, quoique Merlin n’eût point fait exactement ce qu’il voulait, il conserva néanmoins dans le monde sa