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MERLIN L’ENCHANTEUR.

V

La nouvelle que la harpe de Merlin avait retenti arrive aux oreilles de Jacques, sous l’estrade des Funambules. Quoiqu’il fût un peu sourd ou du moins dur d’oreille, il entend lui-même distinctement les cordes résonner au moment où, après avoir ceint son épée de panetier, il allait, aux cris de la sœur Anne, courir sus à Barbe-Bleue.

Le sang lui remonte au visage. Sans en donner avis à personne, il laisse là ses compagnons ; entraîné par le désir d’entendre la voix de son maître, il presse le pas pour arriver au pied de la tour funèbre. Mais il n’osa se présenter qu’après s’être assuré que les derniers courtisans s’étaient retirés et qu’il serait seul, face à face, avec l’Enseveli.

Quoiqu’il n’eût rien dit encore, le bon Merlin avait déjà tressailli à l’approche de son serviteur ; et, lui pardonnant pour la millième fois, des larmes magnanimes inondèrent ses yeux ; il avait d’avance résolu de se taire sur la dernière infidélité de Jacques, craignant dans son infinie bonté que des reproches mérités ne fussent trop amers, s’ils sortaient du tombeau »

« Ho ! Jarni-Dieu ! mon maître ensépulturé ! s’écria Jacques en sanglotant.