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MERLIN L’ENCHANTEUR.

Alors les rossignols qui avaient niché dans le tombeau, pour entendre de plus près la harpe de Merlin, se mirent à chanter près du berceau ; et voici, les notes qu’ils variaient à l’infini :

« L’enfant de Merlin est né ! Fleurs, étoiles, réjouissez-vous ! Il sera plus grand que son père.

« Laissez-le croître dans la solitude : c’est là que la voix argentine retentit le mieux.

« Il sera plus grand que son père. Mais nous, troupe fidèle, nous nous souviendrons toujours de Merlin l’enchanteur. »

C’était le premier enfant qui fût né dans un tombeau. Aussi je vous laisse à penser si ses parents lui firent fête de manière à écarter de lui toutes les mauvaises impressions qui pouvaient venir d’un endroit sépulcral. Certainement, il n’y eut jamais tant de joie, sous le ciel ouvert, qu’il en parut alors dans les lieux souterrains, dont la seule pensée faisait frissonner les hommes.

Le bon Merlin était radieux ; et je n’ai pas besoin de dire qu’il oublia ses livres et sa harpe pour ne s’occuper que du nouveau-né. Il le prenait sur ses genoux, le baisait et disait tout haut, en le berçant : « Puisque j’ai pu si aisément m’accoutumer à ce jour du tombeau, moi qui ai vu le soleil dans sa gloire, que sera-ce de cet enfant né dans le sépulcre ? Assurément il ne regrettera jamais ce qu’il n’a pu connaître. »

Et c’était une chose admirable de voir cet enfant grandir au milieu des ombres de la mort, ne soupçon-