Page:E. Quinet - Merlin l'Enchanteur tome 2, 1860.djvu/350

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
346
MERLIN L’ENCHANTEUR.

— Et que sont les hommes ?

— Des ombres assez méchantes qui passent au pied de la muraille et chuchotent un moment, avant de disparaître. »

Une autre fois, l’enfant entendit Viviane parler du soleil. « Qu’est-ce que le soleil, » demanda-t-il ? Son père lui expliqua malaisément que c’était une petite lampe qui restait suspendue quelques moments au-dessus de la tête des hommes,

« Quoi ! leur lampe ne les éclaire pas toujours comme la nôtre ?

— Nullement, mon fils, la moitié du temps elle se cache.

— Ô père, que ce monde-là doit être triste !

— C’est la vérité plus encore que tu ne t’imagines, mon fils. »

Par cette conversation et par quelques autres du même genre, il n’eût pas de peine à donner à Formose la plus triste idée du monde des vivants. Formose ne se représentait guère les hommes autrement que comme des chauves-souris dont il avait eu l’occasion de voir quelques-unes voleter et tomber éblouies autour de la lampe enchantée.

Vous-mêmes, combien il vous eût été profitable d’assister à tous les enseignements que cet enfant recevait de ses parents ! Tantôt Merlin allait s’égarer avec lui dans la forêt ; il se faisait suivre du centaure, et tous deux enseignaient à l’enfant à tirer de l’arc et jouer de la lyre, à quoi il réussit à merveille. Puis survenait