qui vous entoure, vous n’avez jamais vu l’horreur de cet abîme. Ah ! si vous l’aviez vu face à face, comme nous, auriez-vous pu y vivre ?
— Laissez-moi, répondit encore le souverain des ténèbres. Retirez-vous ! que je regarde une fois, seul à seul, le fond du gouffre. »
À ces mots, le troupeau des ténèbres se retira. Elles fuyaient lourdement, confusément, en rampant et se retournant sur elles-mêmes, car elles espéraient toujours que leur maître allait les rappeler. Mais il n’en fit rien.
Pour la première fois il vit, sans voile, face à face, l’abîme où il avait vécu. Il en eut peur.
IV
« Reviens, Merlin, reviens ! j’ai peur, » hurla le roi de l’enfer.
Merlin accourut près de son père ; il le trouva écumant, la bouche béante, tremblant de tous ses membres.
« Les ténèbres savent où je suis, mon fils. Elles me dénonceront. Connais-tu un lieu plus désert que celui-ci ? je m’y retirerais.
— Il n’en est pas, hormis l’abbaye du prêtre Jean.
— Précisément. J’ai eu cent fois l’envie de m’y cloîtrer, moi aussi, pour une saison. Le préjugé seul m’a arrêté. »