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MERLIN L’ENCHANTEUR.

— Combien de fois dans la nuit ?

— Vingt ou trente.

— Et si je remuais la tête, qu’arrivait-il ?

— La France branlait son chef.

— Et si les bras ?

— Rome croulait.

— Et si les pieds ?

— La couleuvre lombarde se redressait et mordait le vermisseau germanique. Elle annonçait sa présence à ses petits par ses longs sifflements.

— Si les jambes ?

— Les marches d’Allemagne se prenaient à trembler.

— Quand je m’appuyais sur le coude ?

— Le sanglier des Gaules aiguisait ses dents sur le roc.

— Quand je me dressais sur mon séant ?

— Bretagne, Allemagne, Sicambrie, rejetaient le frein qui se fabrique en Italie.

— Et si je soupirais ?

— Vésuve, la Sicile tremblaient.

— Et si je m’écriais ?

— Le lion de la justice rugissait ; et à son rugissement s’ébranlaient les tours des Gaules. »

C’est ainsi que Merlin expliquait les songes du roi Arthus, qui lui en montra tout son contentement. En même temps que le monarque, ses preux, ses cavaliers, ses gens de cour, se tenaient au bas de la tour funèbre et disaient l’un après l’autre :

« Il est donc vrai, Merlin, que vous ne nous trompiez pas en nous promettant le réveil ?