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MERLIN L’ENCHANTEUR.

Pendant que le roi achevait ces paroles, le sage Merlin laissait errer ses yeux sur la foule rassemblée dans l’étroit vallon. Un seul coup d’œil suffit pour convaincre notre héros que toutes les dynasties qui se pressaient devant lui étaient de la famille d’Épistrophius et possédaient un même génie. C’était partout la même nudité non-seulement de corps, mais d’esprit.

« Je savais bien, se disait-il, que les illustres dynasties qui remplissent les temps obscurs où nous vivons ne sont point imaginaires. Il n’est pas moins très-utile que je les aie rencontrées dans cet endroit, afin que je puisse porter témoignage, un jour, en faveur de leur existence. Et vraiment, ajoutait-il en écoutant le murmure confus, discordant qui montait jusqu’à lui du fond de la vallée, je ne saurais dire, après tout, si elles ne font pas autant de bruit que les monarchies et les empires les plus accrédités dans l’histoire des hommes. »

Nos voyageurs étant entrés dans l’enceinte des jeux, il se fit un moment de silence. On conduisit Épistrophius sur une moitié de chapiteau brisé qui devait lui servir de trône. Il s’assit ayant autour de lui ses serviteurs. Aussitôt l’hymne national sortit de toutes les bouches.

Merlin fit des efforts surhumains pour saisir le nom du dieu qu’ils invoquaient. Il lui fut d’abord impossible d’y réussir, parce que la langue des esprits des ruines lui était encore trop nouvelle. Il en balbutiait à peine quelques mots qu’il prononçait fort mal, au point de ne