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spahis : elle était sortie et avait bu avec eux. Alors, comme personne ne voulait plus d’elle pour épouse, elle s’était réfugiée là, dans la vieille maison de son père, et y vivait avec sa tante aveugle. Pour leur nourriture, elle se prostituait. Maintenant, elle craignait le Bureau Arabe… Ça dépendait de lui, le toubib, et elle le supplia de ne pas la faire entrer à la maison publique, de garder son secret. Jacques la rassura… Embarka parlait peu. Son récit avait été simple et bref… Elle semblait inquiète.

Elle quitta Jacques pour aller boucher l’entrée avec des planches et des pierres : parfois, les soldats venaient, la nuit…

Puis, elle revint, et transporta la petite lampe dans la chambre vide et nue : sur le sable, une natte et quelques chiffons composaient tout le mobilier. Là, tout à coup, le bonheur, presque celui dont il avait rêvé… Et la vie lui semblait très simple et très bonne.

    

Embarka, dans l’intimité, était restée silencieuse, discrète, d’une soumission absolue, sans s’ouvrir pourtant. Et cette ombre de mystère dont elle s’enveloppait inconsciemment, loin d’inquiéter Jacques, le charmait. Quand elle le voyait rêver, elle gardait le silence, accroupie dans la petite cour ou vaquant aux travaux de