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appuyer la pointe à la place du cœur, en formulant en lui-même sa question.

Puis, il lui demande son nom et celui de sa mère et, sur une planchette de bois jaune polie, il trace un grimoire inintelligible, un carré composé de lettres arabes, finissant vers le bas en triangle. Il se livre à un calcul à lui connu, puis, presque toujours sans se tromper, il dit au client la nature de son souhait : argent, honneurs, amour, vengeance. Jamais il ne précise l’objet lui-même, en indiquant seulement l’espèce. Il prédit alors si l’impétrant obtiendra ou non l’objet de ses souhaits. Les clients habituels d’El Mogh’rebi affirment qu’il ne se trompe jamais…

Le refrain de ses prédictions est toujours le même, qu’elles soient bonnes ou mauvaises : « Mon fils, patiente, car la patience est bonne. Elle est la clé de la consolation. »

Le taleb accepte sans murmurer la rétribution qu’on lui offre.

D’autres fois, ce sont à ses lumières de khakim, médecin, que l’on vient s’adresser. Il a, suspendus aux solives blanchies de son échoppe, des bottes de simples desséchées. Il manie ces herbes avec une science accomplie de leurs différentes propriétés. Par contre, en chirurgie, son savoir est très limité et ne dépasse guère celui d’un rebouteux des campagnes de France.