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de libre que les quelques banquettes du parquet et quelques petites loges derrière le parterre, ce qui était tout à fait insuffisant. Nous avons mieux arrangé cela. Tout le parterre sera entouré de loges, et entre les premières et les secondes nous plaçons un étage intermédiaire ; nous gagnons ainsi beaucoup de place, sans trop agrandir la salle. » Nous félicitâmes Goethe des bons soins qu’il consacrait au théâtre et au public.

Pour faire aussi quelque chose en faveur de notre joli théâtre futur, j’allai après-dîner à Oberweimar avec mon ami Doolan, et, assis dans l’auberge, près d’une tasse de café, nous écrivîmes ensemble le premier acte du texte d’un opéra, d’après Métastase.

Dimanche, 27 mars 1825.

J’ai dîné chez Goethe en grande compagnie. Il nous a montré le plan du nouveau théâtre. Il est comme il nous l’a décrit il y a quelques jours, et promet une fort belle salle. On dit alors qu’un si beau théâtre exigerait de plus beaux décors, une troupe plus complète, mais que la caisse ne suffirait plus à payer les dépenses. « Oui, pour ménager la caisse, dit Goethe, on engagera une petite troupe à bon marché ; mais que l’on ne croie pas

    très-curieuse. Il y a dans les rues un spectacle qui vaut le spectacle du théâtre. Des carrosses de louage qui ont du voir Wallenstein, traînés par des chevaux plus transparents que le coursier fantastique de Méphisto, amènent au galop une bruyante et folle jeunesse, revêtue du costume des Universités : justaucorps de velours noir garni de brandebourgs, bottes à canons, rapière, écharpe blanche, toque minuscule brodée d’or. Tous les étudiants cependant ne prennent pas cette tenue élégante et légère ; en hiver, beaucoup viennent tout simplement et en voisins, avec une bonne robe de chambre traînant sur les talons. Rien n’est plus bizarre et plus pittoresque que les promenades de ces jeunes gens parcourant la ville par groupes en chantant leur hymne philosophique et bachique : Gaudeamus igitur, dum juvenes sumus !