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Page:Eckermann - Conversations de Goethe, t1, trad. Délerot.djvu/383

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dans les choses et de retrouver, avec sa propre raison, la raison de l’auteur. »

Goethe parla ensuite avec beaucoup d’éloges des poésies de madame Tastu, dont la lecture l’a occupé ces jours-ci, et dont il a énuméré les différents mérites.

Lorsque le reste de la compagnie partit, je me disposai à me retirer également, mais Goethe me pria de rester encore un peu, et il fit apporter un portefeuille rempli de gravures et d’eaux-fortes de maîtres hollandais. « Je veux encore, me dit-il, vous donner pour dessert un petit régal, » et il étalait devant moi un paysage de Rubens. Vous avez déjà vu ce tableau avec moi ; mais on ne peut jamais assez regarder l’excellent, et cette fois il s’agit, de plus, de quelque chose de tout particulier. Voudriez-vous me dire ce que vous voyez ? » — « En commençant par le fond, dis-je, nous avons au dernier plan un ciel très-clair, comme après le coucher du soleil. Puis, tout à fait dans l’éloignement, un village et une ville, éclairés par les lueurs du soir. Au milieu du tableau, une route, sur laquelle marche rapidement un troupeau de moutons se dirigeant vers le village. À droite, des tas de foin et une charrette qui vient d’être chargée. Des chevaux harnachés paissent auprès. Plus loin, çà et là, dans les bouquets d’arbres, des juments avec leurs poulains, qui semblent devoir passer la nuit dehors. Puis, plus près, un groupe de grands arbres, et enfin, tout à fait au premier plan à gauche, des ouvriers qui rentrent chez eux. » — « Bon ! c’est peut-être tout, mais le principal manque encore. Tout ces objets ici reproduits : le troupeau de moutons, la charrette avec le foin, les chevaux, les ouvriers rentrant chez eux, de quel côté sont-ils éclairés ? »