Page:Eckermann - Conversations de Goethe, t1, trad. Délerot.djvu/401

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

vous près de moi ; nous causerons jusqu’à ce que tout le monde soit arrivé. Je suis content que vous ayez fait récemment chez moi la connaissance du comte Sternberg[1] ; il est reparti ; je suis rentré dans mes habitudes de travail paisible. »

« — Le comte me paraît une personne distinguée, dis-je, et ses connaissances semblent remarquables, car, quel que fût le sujet de la conversation, il était toujours comme chez lui, et avec une grande aisance il parlait de tout d’une façon sage et approfondie. »

« — Oui, c’est un homme très-remarquable ; et ses relations, son cercle d’action, sont en Allemagne très-étendus. Comme botaniste, il est connu dans toute l’Europe par la Flora subterranea ; et il est aussi très-considéré comme minéralogiste. Connaissez-vous l’histoire de sa vie ? »

« — Non, dis-je, mais j’aimerais bien savoir quelque chose sur lui. J’ai vu un comte, un homme du monde, en même temps un savant à connaissances variées et profondes ; c’est là, pour moi, un problème que j’aimerais à voir résoudre. »

Goethe alors me raconta que le comte avait été, dans sa jeunesse, destiné à l’état ecclésiastique, et qu’il avait commencé ses études à Rome ; privé de certaines faveurs que lui faisait l’Autriche, il était allé à Naples, et Goethe m’a tracé à fond le récit d’une vie si curieuse, qu’elle serait un ornement pour les Années de Voyage. M. et madame de Gœthe entrèrent avec mademoiselle Ulrike, nous prîmes place à table. On causa gaiement

  1. Botaniste et géologue, président du Muséum national de Bohême. Voir, sur cette institution, les articles de Goethe et de Varnhagen (Goethe’s Werke.xxxii, 181), et l’article de M. Ampère dans le Globe du 30 avril 1828.