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aujourd’hui les deux premières livraisons, une douzaine d’autres environ doit les suivre.

L’auteur, M. Gérard (né en 1770), considéré comme l’élève le plus remarquable de David, a dans son talent plus de charme que son maître. Il a vécu à l’époque la plus tourmentée qui ait jamais ébranlé le monde civilisé ; il s’est formé dans ce temps de désordres, cependant la douceur de son caractère l’a fait revenir à la vérité aimable et pure, et, en effet, c’est par elle seule que l’artiste sait gagner le public. Reconnu à Paris comme un artiste de premier rang ; il a peint à toutes les époques les grands personnages français et étrangers. Il gardait un dessin de chacune de ses œuvres, et, de cette façon, il a fini par se trouver en possession d’une vraie galerie historique. Doué d’une très-heureuse mémoire, il a dessiné aussi des personnes qui lui rendaient visite sans se faire peindre ; et il lui est possible aujourd’hui de nous donner une collection de portraits qui présente l’histoire générale du dix-huitième et d’une partie du dix-neuvième siècle.

L’intérêt durable de cette collection est dû à la grande pénétration de ce spirituel artiste, qui a su donner à chaque personne son caractère distinctif et l’entourer d’accessoires bien choisis qui contribuent à la faire bien connaître.

Sans plus de préambules, j’analyserai les peintures, gardant pour la conclusion les observations générales que j’aurais encore à ajouter. Disons seulement que l’œil habitué aux œuvres de la lithographie parisienne, ne doit rien attendre ici qui ressemble aux portraits lithographies des contemporains, ou à la Galerie de la duchesse de Berry ; car, en ce cas, il serait surpris, et peut-être désagréablement. Ici, nous avons l’œuvre d’une pointe extrêmement spirituelle, qui fait tout ce qu’elle veut, mais qui ne fait que ce qui peut être utile au but qu’elle poursuit. Ce genre était autrefois extrêmement apprécié, et, encore aujourd’hui, on paye un prix élevé les eaux-fortes des vieux maîtres hollandais. Si l’on veut bien accepter ce procédé, et reconnaître les qualités de l’artiste, on sera vite familiarisé avec ce genre de travail.


ALEXANDRE Ier, EMPEREUR DE RUSSIE (PEINT EN 1814).

La pose de ce majestueux personnage, connu et respecté de tous, est excellemment choisie ; les membres sont bien proportionnés ;